Pour un non musulman la période du Ramadan au Maroc est parfois source d'incompréhension, souvent motif d'étonnement, toujours cause de questionnement. Elle peut-être aussi vécue comme une expérience culturelle et sociale unique. Le rythme journalier change, le mouvement de la ville obéit à de nouvelles règles un mois durant. Notre regard extérieur voit les rues se vider de toute présence humaine dix minutes avant l'heure de la rupture du jeûne. Si pour chacun le repère temporel devient l'heure du ftour, il s'agit en fait d'une rupture profonde qui va bien au-delà de ce rituel. C'est en effet toute l'organisation de la vie en société qui est modifiée par rapport au reste de l'année. L'activité économique, sociale, familiale s'en trouve bouleversée.
Le jeûne est total, on ne mange, ni ne boit du lever du soleil à son coucher. Le repas rituel appelé ftour, réunit chaque jour toutes les familles pour un temps de partage. Plats identiques consommés au même moment, à la seconde près.
En fonction du milieu social les tables sont plus ou moins garnies, les mets simples ou raffinés, les préparations minimalistes ou richement décorées mais la trame du repas demeure la même. Une heure précise : la famille, les amis ou les collègues autour de la table, et toujours et partout présents les dattes, la soupe traditionnelle, les gâteaux, les œufs, le pain et le lait.
Des premiers achats quinze jours avant le début du mois de Ramadan au dernier jour du jeûne, l'auteur a épousé le rythme particulier des habitants de Rabat et de sa région. Il a tour à tour participé à trente Ftours dans trente lieux différents, aux côtés de familles, d'associations, d'institutions très diverses. Toutes ont accepté d'ouvrir leurs portes, de partager ce premier repas de la journée, dans un esprit d'accueil et d'échange. Il a pu rencontrer des femmes et des hommes chaleureux, l'invitant à ce rituel immuable en toute simplicité. Moments privilégiés que le livre de Philippe Picquart à l'ambition de vous faire découvrir.